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Fini le poker en public !

Les joueurs de poker sont scandalisés par la décision «stupide et incompréhensible» du tribunal. Ils vont se réunir pour trouver un moyen légal de la contourner.

Laure-Anne Pessina et Fabiano Citroni - le 02 juin 2010, 22h43
Le Matin

56 commentaires

Organiser des tournois de poker Texas hold'em publics à l'extérieur des casinos est désormais illégal en Suisse. Ainsi en a décidé le Tribunal fédéral (TF), dans un arrêt rendu public hier. Seuls sont autorisés les jeux de poker pratiqués entre amis ou en famille. Cette décision fait bondir la communauté des joueurs de poker, qui la trouvent injuste. Ils y voient l'ombre du puissant lobby des casinos.

Le courroux des joueurs de poker est d'autant plus grand qu'ils ne peuvent accepter le principal argument retenu par le TF pour justifier sa décision. Pour le tribunal, le poker serait davantage un jeu de hasard qu'un jeu d'adresse. Cette distinction fait toute la différence, puisque les jeux de hasard sont soumis à la loi sur les maisons de jeu et ne peuvent être exploités professionnellement qu'en casino. Les jeux d'adresse, eux, sont de la compétence des cantons, et peuvent être organisés dans toute la Suisse. La nouvelle est d'autant moins comprise qu'en 2007 la Commission fédérale des maisons de jeu (CFMJ), soutenue deux ans plus tard par le Tribunal administratif fédéral, avait décrété que le poker était un jeu d'adresse. Un recours de la Fédération suisse des casinos vient de changer la donne. Argument bidon retenu par le TF? Conflits d'intérêts? La nouvelle de l'interdiction provoque un tollé.

Réactions virulentes
«Cette décision va mettre au chômage des centaines de personnes», s'indigne Pierre-Yves Mauron, rédacteur en chef de «Slowrolled.com», magazine d'informations en ligne sur le poker. Il rappelle que la Suisse romande compte près de 30 clubs organisateurs de tournois de ce type. «Considérer le poker Texas hold'em comme un jeu de hasard, revient à remettre en cause la tenue des Championnats du monde, la publication de nombreux ouvrages théoriques et la profession de coach de poker.» Serge Guerriero, fondateur de l'Association suisse de poker (région romande), renchérit: «Dans notre classement des meilleurs joueurs suisses romands, ce sont souvent les mêmes qui sont en tête. Ce n'est pas un hasard!»

Concuurence déloyale
Les casinos, eux, ne voient pas le problème. «Le législateur a toujours voulu concentrer les jeux de hasard dans les casinos, or le poker est un jeu de hasard», explique Marc Friedrich, responsable du secrétariat de la Fédération suisse des casinos. Dans ce cas, pourquoi s'attaquer au poker en particulier, et pas aux tournois de chibre, par exemple? «Le chibre, lui, est un jeu d'adresse.»

La Fédération suisse des casinos ne nie pas, cependant, qu'elle a des intérêts financiers dans cette démarche. «Ils nous faisaient de la concurrence déloyale. Nous, les casinos, devons prendre des mesures pour la protection des mineurs et la dépendance au jeu. Pas eux.»

Reste que même les professionnels des addictions désapprouvent la décision du TF. «Les joueurs risquent de retourner à une pratique clandestine», déplore le groupement romand d'étude des addictions. «Propulser les jeunes dans les casinos pour jouer au poker est contre-productif, voire incitatif à la pratique des jeux d'argent.»

Contourner la loi
Les organisateurs de tournois de poker se retrouveront samedi à Yverdon pour une réunion de crise. Au programme: trouver un moyen légal pour continuer d'organiser des tournois. La CFMJ définira, en outre clairement dès lundi, la notion de «cercle familial et amical» donnée par le TF. «Peut-on étendre cette notion à des clubs privés, dont les membres devraient payer une cotisation? Nous devons nous pencher sur la question», explique David Steiner, chef suppléant de la division enquête de la CFMJ. En attendant, il conseille aux passionnés de ne plus jouer.

Que risquent les personnes qui transgresseraient la nouvelle interdiction? Réponse de Sabina Motta, adjointe du secrétaire général du Tribunal fédéral: «Une peine de détention ou une amende pouvant s'élever jusqu'à 500'000 francs.»

Un bon joueur de poker connaît les probabilités, sait bluffer et analyse les comportements des autres joueurs. Ce n’est pas la chance qui le fait gagner! Et pourquoi le jass, basé sur la chance, est-il autorisé? C’est incompréhensible. Dans le poker, il y a surtout une bonne part d’adresse. Je devais organiser un tournoi hier soir, mais je l’ai annulé. Reste une question: mon club de poker emploie cinq personnes. Que feront-elles à présent? Alexandre Bourguet - Copropriétaire de Fripoker, plus grand organisateur romand de tournois

Je suis déçue. La Team Swiss Romand, qui regroupe les espoirs du poker, devait être présentée au public le 12 juin. Tout ça risque de tomber à l’eau. Si ce n’était qu’un jeu de hasard, vous perdriez avec deux petites cartes, et vous gagneriez avec deux cartes élevées. Mais ce n’est pas comme ça que ça se passe. Tout ça, c’est une histoire de gros sous. Et c’est le jeu qui va en pâtir. Cette décision va inciter les gens à jouer dans la clandestinité. C’est regrettable. Laila Chroqui - Membre de la Team Swiss Romand

Le lobby des casinos a fait le maximum pour que le poker soit considéré comme un jeu de hasard. Ce mastodonte a gagné contre les petits organisateurs. Cette décision est une catastrophe. Pensez à tous les gens qui ont investi de l’énergie et de l’argent pour organiser des tournois de qualité. Et pensez aux amoureux du poker. Les casinos veulent la mort de ce jeu. Les tournois qu’ils organisent sont chers et se jouent très rapidement. La beauté du jeu, ils s’en moquent. Anne Ramseier - Membre de la Team Swiss Romand

Je comptais ouvrir une nouvelle salle de poker, mais je ne vais pas le faire, alors que j’ai payé le premier loyer. Les personnes estimant que le poker est un jeu de hasard n’ont jamais joué de leur vie. On ne gagne pas en fonction de ses cartes, mais de la façon dont on joue sa main. C’est différent! J’ai été membre de la Fédération romande de jass pendant plus de dix ans. Dans ce jeu, la part de chance est plus importante qu’au poker. Pourquoi ne pas l’interdire alors? La décision du tribunal est incompréhensible. Christian Delacombaz - Patron de Gruyère-poker

Misterno a écrit :Pour moi, tous les jeux d'argent doivent se jouer dans des lieux adéquats, fait pour ça, controlés et interdit au mineurs... Le poker salarie plusieurs personnes, mais les casinos également. La différence est que les casinos paient des impots, eux

kebion a écrit :Et le tournoi de Jass organisé par le bistro " le Pavillon des Sports" ?

Monsieur Belette a écrit :

kebion a écrit :Et le tournoi de Jass organisé par le bistro " le Pavillon des Sports" ?

Fais gaffe... Et le loto de l'US Ayent-Arbaz ?